Les notaires sont des intermédiaires incontournables sur lesquels les Français aiment pouvoir compter. Donation-partage, succession, transaction immobilière, un bon notaire est d’une aide précieuse pour de nombreuses décisions et opérations qui comptent. C’est la profession libérale la mieux payée de France. Une profession qui jouit d’un monopole sur tous les actes qu’elle signe. Le statut n’a pas bougé depuis la Révolution.

Chaque année, 20 millions de Français prennent rendez-vous chez des notaires. Mais peut-on toujours faire confiance à son notaire ? De récentes affaires de malversations et de spoliations d’héritage ont égratigné l’image du notable.

En 2015, la loi « Macron » prévoyait d’encadrer plus strictement leur profession. Mais les notaires ont réussi à amoindrir la portée de la réforme grâce à un intense lobbying. Complément d’enquête révèle les coulisses de cette vaste opération d’influence dans les couloirs de l’Assemblée nationale Mais aussi dans la rue où des cabinets ont réussi à mobiliser leurs salariés.

Le projet de loi prévoyait de supprimer la possibilité pour un notaire d’habiliter les clercs. Cela 12 mois après la promulgation de la loi. À terme cette suppression a pour but d’inciter de nouveaux notaires à ouvrir leur propre étude. Et récupérer la clientèle d’autres études notariales. Le délai de 12 mois est parfois vu comme un frein à l’application réelle de cette mesure. En effet, cela laisse aux notaires la possibilité d’anticiper sur l’application de la loi en habilitant tous les clercs qui ne le seraient pas encore pour continuer à faire fonctionner leur étude. Le texte prévoit également la suppression de l’actuel dispositif d’habilitation qui permet aux clercs assermentés de recevoir certains actes en lieu et place du notaire. Ce projet de loi met aussi en place une limite d’âge d’activité fixée à 70 ans .

Un notaire qui dissimule la construction d’éoliennes

C’est le quotidien économique capital.fr, qui ouvre le bal dans un article mis en ligne le 22 mars 2016. Il révèle la décision du tribunal de grande instance d’Argentan (61). La décision est d’annuler la vente d’un haras de 22 ha et de ses dépendances, pour 530 000 €. Lors de la transaction, le vendeur, le notaire et la société d’aménagement locale avaient oublié de préciser l’ouverture prochaine d’un parc de 10 éoliennes géantes.

Si la plaignante récupère le montant de la vente assortie de dommages et intérêts, il y a plus grave. En effet, l’enquête a démontré que le notaire savait pertinemment qu’un champ d’éoliennes devait être construit. Un défaut d’information qui pourrait bien l’amener à être jugé en pénal.

Un notaire condamné pour abus de faiblesse sur une personnes âgée

Dans une affaire, M.X. a été poursuivi pour avoir, alors qu’il était notaire, abusé de la faiblesse de Mme Y., une personne vulnérable dont il était le curateur. Concrètement, le notaire lui a fait souscrire un contrat d’assurance vie d’un montant de 75 000 € au profit de sa fille. Et, ultérieurement, a fait modifier la clause bénéficiaire afin de transférer les fonds à ses propres petits-enfants.

Une signature sur un lit d’hôpital

Pour déclarer le prévenu coupable du délit d’abus de faiblesse, la Cour d’appel a souligné plusieurs choses. Lors des faits, la victime présentait un syndrome de glissement, emportant une perte du goût de vivre. De plus, elle souffrait aussi d’une insuffisance rénale aiguë nécessitant de fréquentes dialyses, de problèmes de vue et de problèmes des membres inférieurs, l’empêchant de marcher.

Les juges d’appel ont également relevé que le notaire avait lourdement insisté sur plusieurs points. Tout d’abord pour recueillir la signature de la victime pour la souscription du contrat d’assurance et du changement de bénéficiaire au profit de sa famille. A ce moment-là, la victime était hospitalisée. Malgré l’intervention du médecin gériatre de l’établissement pour empêcher la conclusion de ces actes, le contrat a quand même été signé. Cela a retardé le transfert de Mme Y. par le SAMU vers un hôpital où la dégradation de son état de santé imposait de la faire admettre dans un service de réanimation.

Il tente de faire jouer la prescription

Pour échapper à la condamnation, le notaire a invoqué la prescription de 3 ans applicable à ces délits. Ce délai a été allongé à 6 ans en 2017. En vain, car la Cour de cassation a maintenu la peine d’un an de prison avec sursis et l’amende de 75 000 € prononcées en appel. Elle affirmait que la prescription, en matière d’abus de faiblesse, ne commence à courir qu’à partir du dernier prélèvement effectué sur le patrimoine de la victime. Pour les juges, le changement de bénéficiaire en 2012 au profit des petits-enfants n’était pas couvert par la prescription. En effet, cela constituait une même opération avec la souscription du contrat 6 ans auparavant.

Après avoir écarté les arguments de l’ancien notaire sur la prescription des actes, la Cour de cassation a confirmé la décision rendue en appel. Elle estime que, compte tenu des circonstances, la modification de la clause bénéficiaire et la souscription d’un contrat d’assurance-vie caractérisent en une seule opération le délit d’abus de faiblesse.

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