Éric Brion, désigné comme le « premier porc » du mouvement international «#Balancetonporc ». Remporte une victoire judiciaire, le 25 septembre. Le TGI de Paris a condamné son accusatrice publique, Sandra Muller, pour diffamation.

#BalanceTonPorc

Deux ans après avoir lancé la “rébellion” #Balancetonporc sur Twitter, Sandra Muller, initiatrice de ce mot-clé emblématique, a finalement été condamnée pour diffamation. Elle doit verser 15.000 euros de dommages et intérêts à Éric Brion, l’homme qu’elle avait nommément accusé de harcèlement. Un verdict que déplorent amèrement les militantes de la cause. 

Accusations excessives ou nouvelle injustice à l’égard des femmes? Force est de constater que la très grande majorité des prévenus, très majoritairement masculins, ne sont pas souvent reconnus coupables de leurs actes.

Les propos avaient été tenus lors d’une soirée cannoise en 2012, où ils se trouvaient tous les deux. Les deux messages avaient surtout connu un écho retentissant sur Twitter, suscitant une vague de solidarité féminine sur les réseaux sociaux. Le mouvement #MeToo voyait le jour de l’autre côté de l’Atlantique. Éric Brion, avait décidé de déposer plainte contre Sandra Muller pour diffamation. S’il reconnaissait des “propos déplacés”, il contestait formellement être un “harceleur sexuel”.

Condamnation de Sandra Muller pour diffamation

Et la justice allait lui donner raison. Selon le verdict du tribunal de Paris, Sandra Muller a en effet “manqué de prudence dans son tweet”, utilisé “des termes virulents, tels que porc et balance” et “dépassé les limites admissibles de la liberté d’expression”. La cour a ainsi considéré que ses propos avaient dégénéré en “attaque personnelle” et exposé sa cible à la “réprobation sociale”.

Dans cette décision, rendue par un juge civil, le tribunal rappelle une chose fondamentale : si l’on accuse publiquement, sur les médias sociaux, une personne présumée innocente d’une infraction qu’elle n’a pas commise ou que l’on ne peut prouver, on s’expose soi-même à être condamné pour diffamation. En cela, le tribunal ne fait que rappeler un principe qui existe depuis la loi sur la presse de 1881. Cela ne veut pas dire qu’on ne peut pas dénoncer des faits dont on s’estime victime, cela veut simplement dire que, si on veut les dénoncer, on doit le faire par la voie d’une plainte adressée aux autorités judiciaires (et non sur Twitter).

En revanche, ce qu’il ne faut surtout pas lire dans ce jugement, c’est une critique du mouvement #MeToo ou #BalanceTonPorc. Il n’est pas question de restreindre la parole des femmes victimes de violences. C’est un combat essentiel sur lequel les politiques pénales doivent continuer à évoluer pour que les victimes se sentent entendues et accompagnées judiciairement.

Quelle victoire ou quelle défaite signe cette affaire ? Celle de la justice sur la morale ? Celle du tribunal judiciaire sur le tribunal médiatique ?

C’est une victoire du droit sur la morale et les médias. Mais, derrière elle, cette affaire est le symptôme d’une défaite de notre système judiciaire face à l’opinion publique. 

En effet, si certaines personnes ont plus facilement recours au tribunal de l’opinion publique plutôt qu’aux juges dont c’est la fonction, c’est parce qu’elles considèrent (à tort ou à raison) que le système judiciaire est incapable de protéger les « victimes » et de faire condamner les auteurs. D’où le recours à des dénonciations dans les médias sociaux qui rendent un verdict instantané et sans appel.